Je quitte Chaumont à 8h laissant mon compagnon de route pensif au bord de la Loire ; il doit prendre le train à Orléans le lendemain pour les brumes du Nord ; peut être jusqu’au Danemark me dit-il.
Je commence par me perdre dans la campagne, défaut de signalisation ou défaut d’attention. J’arrive à Blois par la grand route en pleine heure de pointe; je retrouve un environnement oublié depuis 10 jours. Après le pont je trouve à droite sur une allée de cerisiers qui mène vers le fleuve et le bruit s’estompe rapidement. A nouveau seul. Un peu plus loin j’avise un banc et une pelouse ; il n’est que 11h45, qu’à cela ne tienne, l’avocat est loin. Je m’installe et ouvre une boîte de sardines à l’ancienne, marque le Connétable, les meilleures.
La piste file entre des rangées de feuillus qui cachent la Loire, puis directement sur la berge ; le vent n’est pas de mon bord aujourd’hui , il frisotte la surface du fleuve. Je pédale à un bon rythme.
La piste continue sur la levée ; j’aperçois au loin les tours d’une centrale nucléaire puis les contourne, silencieuses, massives, menaçantes. Dans les mares, au bas de la levée, les grenouilles coassent.
Avant d’arriver à Orléans la piste est bordée d’accacias en fleurs. Je rencontre un couple qui va aussi vers la mer Noire mais eux prennent leur temps ; arrivée prévue fin août. Ils ont une drôle de machine ; elle, allongée dans un fauteuil à l’avant, pédale et lit la carte, lui derrière sur la selle conduit. Ils vont plus vite que moi ; je prends leur roue sur 10km; enfin un peu de repos après une journée vent de face.
L’entrée dans la ville est sans charme. Je ne vois rien de la ville si ce n’est l’esplanade face à la Loire. Je rencontre un couple de Landerneau qui lui aussi va à Constanta et compte arriver fin juillet ; on devrait se revoir.
Je longe le canal qui mène à Mardié; je rencontre un vieux cyclo qui va dans la même direction ; il me dit de prendre sa roue; mais il va vite le bougre, je serre les dents, jette mes dernières forces, sent l’acide lactique me brûler les jambes. A Checy je demande à une jeune femme « C’est encore loin Mardié? » « 10km environ « ; devant ma moue elle concède » Allez, 7″. Nous continuons sur le halage; 3 km plus loin nous y sommes. Ah les femmes !
Mon poisson pilote me dépose à 50m de ma destination ; entre temps il m’aura fait part de ses origines bretonnes, parentèle à Guipavas, au Conquet. La solidarité cycliste, encore une fois, a joué à fond. Merci l’ami.